9 août 2014

World war korea

Introduction

World war korea

Il y a quelques mois, j’étais à Bagneux pour le salon Zone Franche où j’ai rencontré par hasard Jerôme Vershueren, l’auteur de World War Korea avec qui j’ai un peu discuté de son jeu. J’ai été particulièrement intéressé notamment parce que j’attendais depuis longtemps une campagne contemporaine qui prendrait place dans un contexte mondial. Un truc avec des pays à traverser, des pions à pousser sur une grande carte et des choix à faire pour les joueurs de décider dans quel ordre faire les missions. Une sorte de « Masques de Nyarlatothep » 2014. J’attendais tellement que j’avais commencé ma propre version d’ailleurs. Vous allez voir que ce jeu fait tout cela et de manière bien élégante.

Le livre

World war korea est un jeu de Jérôme Vershueren sorti dans la collection Clé en main chez les 12 singes. L’idée est d’avoir une campagne de jdr complète, règles et aides de jeu comprises en un seul bouquin, ici au format A5 ou approchant. Et au prix de 30€.

Le jeu se présente sous la forme d’un livret de 64 pages avec la campagne proprement dite, 7 fiches volantes avec les règles du jeu et quelques caractéristiques d’opposants classiques, 8 fiches qui sont autant de personnages prétirés, 8 feuilles d’aides de jeu à découper et une feuille de suivi de campagne, le tout rangé dans une couverture en carton épais faisant office d’écran et de carte du monde.

Les règles

En ce qui concerne les règles, l’auteur a utilisé une base de dk (dk2 ou futurdK) lourdement modifié et simplifié pour l’occasion. On lance 3d6 dont on fait la somme puis on ajoute une compétence et on doit battre un facteur difficulté. Des points d’héroïsme permettent d’améliorer les jets, de faire plus de dommages en combat ou d’éviter des coups mortels. Chaque personnage possède quelques capacités spéciales de combat permettant par exemple d’être plus efficace avec certaines armes, de combattre plusieurs adversaires à la fois ou d’obtenir des bonus si le personnage a perdu des points de vie.

J’ai beaucoup aimé la simplicité et l’efficacité du système. Tout y est, ça va vite et sans prise de tête. Il n’y a pas de règles de création de personnage ou de liste d’atout pour la bonne raison qu’on ne peut jouer que les personnages existants.

J’ai quand même relevé quelques petits soucis, par exemple pour éviter de relancer les dés pour les dégâts, l’auteur recommande de prendre le jet qui a servi pour toucher. Le problème habituel est que si ce jet est élevé alors les dégâts le seront aussi. On appelle ça le Ninja de verre. Par exemple, un ennemi avec une défense exceptionnelle sera très dur à toucher, les joueurs rateront souvent parce qu’il faut faire un jet énorme, mais au moment où ils le feront, l’ennemi sera défait instantanément.

Pour les joueurs commencer le jeu est très simple, ils choisissent un personnage, coche un des deux atouts de leur feuilles et se lancent.

La campagne

L’introduction commence lorsque les personnages se réveillent dans un lit d’hôpital. La lumière vacille, des tirs d’armes automatiques se font entendre non loin et il y a des morts partout. On peut dire que ça commence brutalement, et ça ne s’arrêtera pas jusqu’à la fin de la campagne.

Je ne vais pas rentrer dans les détails pour éviter de spoiler, mais disons qu’on parle de conspiration et de guerre mondiale à partir de la Corée (d’où le nom hein), de biotechnologie, d’infection virale, de monstres mutants et d’écologie. Autant j’adore ces thèmes autant la manière de le présenter au début m’a fait un drôle d’effet. J’avais l’impression de lire une histoire que j’aurai pu écrire à 14 ans après un épisode de GIJoe. Il y a des mouvements de blocs géopolitiques que je trouve difficile à avaler, tout va un peu trop vite et les conspirations sont trop puissantes et efficaces à mon gout. Il y a par exemple des super-soldats quasi invincibles et ils ne sont pas 3 ou 4 mais plusieurs millions. Pour ceux qui connaissent il y a un épisode de Community saison 5, tout en dessin animé, qui démonte un peu le côté simpliste de ce genre de scénario. Autant dire que mon enthousiasme a été douché et que j’ai mis quelques jours avant d’y revenir et j’ai bien fait parce qu’une fois qu’on a passé ces explications, on entre en plein dans le jeu et ça devient vraiment bien.

World war koreaAprès l’introduction, les personnages vont avoir un certain nombre d’indice à suivre et de pistes à explorer. C’est à eux de voir par quoi ils commencent, où ils vont et surtout jusqu’où ils vont. Chaque piste est un scénario à part entière au sein duquel les personnages vont enquêter, combattre, et dépasser des obstacles. Ces scénarios font en moyenne deux pages, écrit petits. Ce n’est pas très développé mais c’est écrit dans un style très direct avec uniquement ce qui est important. Les objectifs, les opposants, les lieux, les règles spéciales. Par exemple, dans une piste les personnages se déplaceront en hélicoptère, dans une autre ils seront en temps limité, dans un troisième il faudra sauver des gens et plus ils en sauvent plus ils obtiennent d’informations.

A chaque piste, plusieurs éléments seront notés par le Mj sur la fiche de suivi de campagne. Ces éléments peuvent servir lors de l’exploration d’une ou plusieurs pistes ultérieures. Par exemple un pnj qui a été sauvé peut revenir par la suite. S’il n’a pas été sauvé quelqu’un d’autre peut prendre sa place mais il sera moins compétent.

Un point très intéressant est que les joueurs peuvent tout à fait foirer les pistes. Dans certains jdr, il y a des encadrés expliquant comment retomber sur ses pieds si les joueurs ratent. Ici, ils ratent, ils n’ont pas l’info, ils ne protègent pas les gens, ils ne rentrent pas dans les bons endroits, et bien ce n’est pas grave, la piste peut être abandonnée, les autres sont toujours disponibles. Il y a une trame principale à découvrir et à comprendre et il y deux autres trames optionnelles, plus ou moins difficiles à suivre en même temps. Chacune de ces pistes donnera une fin différente lors de l’épilogue, à la manière des anciens Fallout ou chaque action était reportée lors du générique. On a donc toute une palette de fins possible de la plus positive à la plus horrible en passant par plusieurs intermédiaires aigre-doux.

Conclusion

Au final, malgré quelques petites erreurs j’ai beaucoup aimé. C’est rapide, fun, plein plein plein d’actions, plein de choses à faire tout le temps pour les joueurs et surtout des choix moraux, des choix de jeu et des choix tactiques sont présents constamment. Par exemple, il y a une règle qui autorise les joueurs à utiliser autant de points d’héroïsme qu’ils le souhaitent. Mais à chaque fois qu’ils le font le monde s’assombrit. A eux de voir s’ils veulent jouer les super-héros au risque de pourrir la planète ou bien s’ils font attention à rester à un niveau de puissance raisonnable pour tenter d’obtenir une fin heureuse.

En tant que Mj ça me correspond parfaitement, le style de présentation des scénarios me plait beaucoup, c’est dense et plein d’informations utiles et la gestion de campagne m’amuse beaucoup. Dans les inspis jdr, j’ai déjà parlé des Masques pour l’organisation elle-même, mais pour une raison que je ne m’explique pas vraiment, j’ai beaucoup pensé au Réseau Divin, une excellente campagne parue dans Casus Belli première mouture il y a un paquet d’année. Je retrouve dans World War Korea l’ambiance fin du monde, décadente, et pulp qu’il y avait dans le réseau divin.

Bref, je le conseille fortement.

Voici la version audio directement tirée du Radio-roliste numéro 38