Jeu de rôle

Critique de Horreur à Arkham, le jeu de rôle

Petite critique rapide de Horreur à Arkham, le jeu de rôle, tiré du jeu de société du même nom, lui-même inspiré du jeu de rôle L’Appel de Cthulhu, lui-même écrit d’après les nouvelles de notre cher H.P. Lovecraft. Eeet la boucle est bouclée.
Je n’avais pas entendu parler de ce jeu, ou très peu, et c’est en regardant la boîte dans un magasin que j’ai été intrigué. Une très jolie boîte en carton épais, émanation d’un jeu de société que j’aime beaucoup malgré sa punitivité et sa complexité — j’ai évidemment craqué.


Unboxing

Alors, quoi qu’il y a là-dedans ?

Eh bien, plein de choses. La boîte est bien remplie, le matériel est de très bonne qualité. Notamment, les cartes sont imprimées sur un papier très épais, limite bristol. Il y a des pions sur un carton très épais aussi, cinq feuilles de personnages avec tout ce qu’il faut pour jouer. Elles se présentent sous la forme d’un A3 plié en deux (j’ai dit que le papier était TRÈS épais), et contiennent toutes les bonnes informations : les caracs, le matos d’origine, les règles importantes, les montées de niveau… tout y est.

Il y a deux sets de 12 D6 chacun, donc 24 D6, plutôt jolis, 12 noirs et 12 verts. Ça semble faire beaucoup, mais vu qu’il en faut au moins 6 par perso, en vrai ce n’est même pas suffisant. J’en parlerai après, mais à cause d’une astuce de jeu, c’est compliqué de se les prêter. Ensuite, on trouve les cartes de monstres, parfaites, épaisses, solides, avec illustrations, motivations, et infos techniques. Et enfin, les cartes de matériel : les armes, armures et autres trucs qui font boum. Je rêverais d’une telle qualité pour mes cartes YxY.

On termine par l’aventure elle-même, sous la forme d’un livret cousu, un peu chelou d’ailleurs. La couture n’est pas super, y’a un fil qui dépasse, c’est vraiment bizarre par rapport à la qualité globale du machin.

Il n’y a pas de bouquin de règles à part, celles-ci étant incluses dans l’aventure.

Les illustrations sont absolument magnifiques, la maquette lisible, et j’ai dû voir une seule typo dans l’immensité du texte, ce qui est une sorte d’exploit…

Il faut savoir que je suis fan de matériel de jeu, surtout pour du Cthulhu. Je me souviens de parties où le frisson venait plus de la découverte d’un vieux carnet coincé derrière un meuble ou d’un message codé que le MJ avait imprimé sur un papier vieilli, que de la description d’un monstre vu déjà 100 fois.

Là, c’est un peu pareil : on a plein de matériel de jeu, et toutes les aides de jeu, tous les indices sont matérialisés.

Les règles

Les règles sont présentées dans les deux premiers actes du scénario (qui en comporte trois).

Elles ne sont pas très compliquées en soi, mais parfois un peu rigides dans leur explication. Typiquement, il existe trois types de scènes :

  • les simples, où tu parles et fais des actions évidentes (ouvrir une porte, répondre au téléphone),
  • les complexes, qui nécessitent des jets de dés,
  • les structurées, principalement les combats. La structure vient du découpage en rounds, nécessaire pour les scènes de bagarre.

Chaque joueur possède une réserve de dés : 6 s’il est en bonne santé, et de moins en moins au fur et à mesure des dégâts physiques encaissés. C’est très élégant et très visuel. Un perso avec 3 dés restants n’est clairement pas bien.

Les dégâts psychiques, dits d’horreur, remplacent les dés normaux par des dés verts. Si ces dés font 1, le personnage chope des traumas. Ce qui peut l’inciter à ne pas agir, justement pour éviter de lancer des dés. Idem, c’est plutôt élégant : j’aime quand la technique produit des effets de jeu ou incite à un certain comportement.

En dehors de ça, pour réussir une action, le personnage choisit un nombre de dés à lancer (jusqu’à son max). Chaque dé qui égale ou dépasse sa caractéristique est une réussite. Plus y’en a, mieux c’est.

Exemple : Joe tire au fusil de chasse sur le Byakhee méchant. Il choisit de lancer 4 dés (il a été blessé d’un point précédemment et veut en garder un pour se défendre), fait trois réussites, ce qui entame la créature et lui occasionne une blessure directement.

On peut garder des dés pour se défendre lors du tour de l’adversaire. Et les dégâts sont fixes en fonction de l’arme.

Juste une petite précision manquante : il me semble qu’on ne peut faire qu’une action par tour. Pas question de faire six attaques à un dé chacune, par exemple.

Dans les scènes structurées, on récupère tous ses dés à chaque round. Tandis que dans les scènes complexes, on récupère tous ses dés en une fois, quand le MJ décide que la scène avance. C’est pas mal, parce que ça oblige tout le monde à jouer et à dépenser ses dés. (Si Michel a dépensé 5 dés et Marc 2, on voit bien qu’il reste du temps à Marc, qui devrait trouver des choses à faire avant que la scène n’avance ou se termine.)

La gestion du temps est donc matérialisée par les mêmes dés, et encore une fois, je trouve ça élégant.

Enfin, le système de combat prévoit des battlemaps (des plans avec des cases), des déplacements précis case par case, des portées d’arme, etc. Ce n’est pas du tout ma came, mais ça aide certains joueurs à mieux visualiser ce qu’il se passe et où ils se trouvent.

Les personnages

Les cinq personnages présentés sont pré-tirés. Les joueurs n’ont rien d’autre à faire que de choisir celui qui leur plaît et de démarrer immédiatement. Il n’y a pas de système de création de personnage, et les évolutions sont conditionnées par le scénario lui-même.

Toute la palette classique de Cthulhu s’y retrouve : une lanceuse de sorts, un détective, une combattante au contact, un fossoyeur et une psychologue. Tous les personnages sont expérimentés et connaissent le surnaturel ou sont prêts à l’affronter rapidement. Pas question de se lancer en débutant tout frais. Même les règles de santé mentale sont un peu plus permissives que d’habitude.

Les personnages sont intégrés dans le scénario, et à plusieurs reprises, il sera fait mention de contacts que l’un ou l’autre pourrait avoir, les aidant dans la situation en cours.

L’aventure

À mon humble avis, c’est là que cela pêche un peu.

C’est un scénario ultra-classique pour débutant complet. Il y a zéro originalité : une secte de méchants veut invoquer un Ancien, il faut leur péter la mouille et arrêter le rituel. Fin.

En lisant le scénario, on retrouve les mêmes idées et développements qu’on pouvait lire il y a 30 ans avec Star Wars D6 : des paragraphes et des scènes très découpés, des lignes à lire ou paraphraser aux joueurs, des explications réduisant au maximum les frictions. On sent bien que c’est fait pour accompagner un maître de jeu (et des joueurs) qui se lanceraient pour la première fois. Ce n’est absolument pas un mal, mais c’est à savoir.

Il n’y a d’ailleurs qu’un seul scénario. Même s’il est complet, avec du matos de partout, c’est un peu chiche. J’aurais bien aimé avoir des idées de suite, à la manière du jeu de société qui présente des campagnes absolument fantastiques.

Par contre, tout y est : des battlemaps pour chaque lieu décrit, des fiches de monstres pour tous les PNJ rencontrés, des pions/figurines à placer, etc.

Il y a même des puzzles à résoudre, physiquement !

Conclusion

J’ai beaucoup aimé le matériel, la prise en main pour les débutants, et la promesse implicite de continuer à proposer une telle qualité de fabrication.

Je ne suis pas convaincu par le scénario lui-même, ni finalement par les règles. Elles ne sont pas mauvaises, loin de là : elles ne sont pas trop compliquées, élégantes, et proposent des possibilités de prises de risque. Mais je ne vois pas l’intérêt par rapport aux systèmes existants.

Le jeu est à 35€, et promet sans doute une à deux belles séances de jeu, ce qui n’est pas cher par rapport à la qualité du matériel.

C’est bien sûr parfaitement traduit (merci Sandy Julien).

En attendant de voir la suite, je conseillerais cette boîte aux débutants ou semi-débutants qui veulent découvrir Cthulhu et/ou un jeu de rôle qui n’est pas D&D.

Retour d’expérience sur Critical, part ouane.

Il y a quelques semaines, j’achetais Critical, un jeu d’initiation à destination des débutants. Depuis, j’ai fait jouer les quatre premiers scénarios, en deux séances d’un peu plus d’une heure.


Première séance

La première séance s’est plutôt bien déroulée. Il s’agit de deux combats assez brutaux, avec un peu de contexte pour expliquer comment on en arrive là, mais c’est tout. Y’a un côté super gonzo du jdr où on vire tout ce qui n’est pas directement le cœur de la partie. Là, c’était baston, alors tout mène très rapidement à la baston.

Le système est extrêmement facile et rapide à prendre en main, et les combats sont justement très expéditifs. Les personnages ont deux points de vie, donc peuvent encaisser deux coups d’une arme de base type pistolet, et un seul d’une arme de guerre type fusil d’assaut. D’ailleurs, il n’y a que deux armes (+ une spéciale qui intervient plus tard dans la campagne). Il y a aussi peu de possibilités d’éviter les dégâts, à part pour le perso du soldat qui dispose d’un équipement adéquat lui permettant de rester debout un peu plus longtemps.

Toutes les scènes d’action sont limitées en temps. Un compteur, généralement positionné à trois tours, permet de se concentrer sur le principal. Encore une fois, efficacité avant tout. Si à la fin des trois tours, les personnages n’ont pas réussi, le dénouement est un poil différent mais la scène s’arrête là.

Il n’est pas possible non plus de mourir. Un personnage suffisamment blessé s’effondre et joue le reste du scénario avec des malus, c’est tout.


Seconde séance

À l’inverse de la première séance, tout en action, la seconde séance et donc les deux scénarios suivants mettent l’accent sur l’enquête. Les indices étant matérialisés physiquement par des cartes ou des morceaux de cartons représentant les objets acquis. Il y a quelques astuces à la Unlock, et les joueurs sont invités à bien observer ce qu’ils ont sous la main et interroger le maître de jeu sur ces éléments pour comprendre l’histoire.

Il y a des indices obligatoires pour comprendre le fil de l’histoire et avancer et un certain nombre d’indices supplémentaires ouvrant de nouvelles pistes et questions.

Une fois encore, les scénarios sont ultra-linéaires. Le Mj lit la situation et le traditionnel « Que faites-vous ? » intervient très tard dans la description de la scène. Du coup, les joueurs n’ont aucune autre possibilité que de faire ce qu’on leur dit et d’évoluer dans une bulle de gameplay beaucoup plus serrée par rapport aux autres jeux. Dans le cadre de l’enquête, finalement, cela consiste simplement pour les joueurs à dire qu’ils essaient d’en savoir plus sur tel ou tel élément repéré précédemment. Je le ressens un peu comme une désincarnation des personnages. Si l’immersion est renforcée par la qualité des illustrations et des aides de jeu, le fait de ne faire que ce qu’on vous demande et surtout pas autre chose me sortirait un peu de l’univers si je devais passer de l’autre côté de l’écran.


Conclusion

Pour l’instant, je suis mitigé. En tant que Mj, je passe une dizaine de minutes à préparer la séance, en allant chercher les cartes, indices et pions nécessaires, puis je lis ce qu’on me dit de lire, dans l’ordre.

Je ne me trouve pas super impliqué, et je suis à deux doigts de penser qu’on pourrait tout à fait utiliser une application sur son téléphone pour remplacer ce rôle traditionnel.

Côté joueurs, les miens n’étant pas complètement débutants, s’ils n’ont pas l’air de s’ennuyer, ils ne sont pas pour autant super actif, n’étant pas vraiment très sollicités.

L’expérience est clairement différente de tout ce que j’ai pu jouer depuis mes débuts. Ce jeu est construit comme un train fantôme (terme emprunté aux jeux vidéos). Ils sont dans une voiture qui va tout droit et il y a des trucs qui se passent autour d’eux sans qu’ils puissent réellement faire autre chose que ce qu’on attend d’eux.

Je reste sur ce que j’avais dit dans la critique de mon précédent article, cela fonctionnera super bien avec des débutants complets, mais avec des gens qui ont déjà une demi-douzaine de parties, j’ai peur que cela les renvoie à une position un poil trop passive.

Critique de Critical Saison 1

J’ai découvert Critical un peu par hasard, dans une boutique de jeu de société et pas vraiment de jeu de rôle, entre Unlock et le dernier set de carte Magic. C’est en croyant avoir à faire à un énième escape game que j’ai attrapé la très belle boite et m’apercevoir qu’il s’agissait d’un jeu de rôle complet, axé initiation et comportant du matériel comme pour un jeu de plateau. Tombant pile-poil dans mes obsessions du moment, j’achète le jeu et décide d’en faire une critique.


Déballage

La première impression est très bonne. La boite respire la classe, et je me retrouve comme un gamin découvrant l’œil noir, édition Gallimard, pour la première fois. Un carton d’excellente qualité, quatre feuilles de personnages permettant pour chacun de choisir son genre (hey, vazy je l’avais déjà fait là !), des petits cartons pour l’équipement et les indices, et de plus gros pour les illustrations, que je trouve très jolies et très immersives. Le jeu se complète d’un livret de règles, de quelques dés spéciaux, et de huit scénarios tenants chacun sur une feuille A4.

L’écran en quatre volets contient les règles complètes du jeu et dispose de deux encarts en plastique permettant de placer des cartes d’illustrations ou de personnages-non-joueurs à la vue de tous. C’est très astucieux.

La présentation me plait beaucoup, pour la raison que je suis personnellement convaincu que ce genre de format est très ludique pour des débutants, permettant de s’approprier physiquement les différents éléments pour améliorer l’immersion. C’est ce que je fais déjà beaucoup avec YxY et ses différentes versions, et voir une version aboutie me conforte dans mes idées.

Les règles

Rédaction

En gardant à l’esprit que les règles se doivent d’être simple et prévue pour l’initiation, j’ai trouvé qu’elle manquait un peu de fluidité. J’ai dû regarder à plusieurs endroits et essayer de comprendre ce qu’était exactement des “réussites”. Dans d’autres jeux, on dit qu’on a une réussite lorsqu’un dé donne un certain résultat et on peut obtenir plusieurs réussites lorsque plusieurs dés lancés simultanément obtiennent chacun individuellement le score demandé. Là, il a fallu que je me rende compte que les d12 fournis n’étaient pas des dés ordinaires et que les chiffres inscrits n’étaient pas linéaires. Donc si le d12 donne un résultat de 2, on a 2 réussites. Ce n’est qu’un simple problème de sémantique, mais qui m’a un peu perdu.

De manière similaire, les informations ne sont pas répétées et il y a peu de renvoi indiquant où trouver l’information. C’est une fois l’intégralité du jeu lu qu’on a la vision complète, on ne peut pas vraiment démarrer rapidement. Ce n’est pas un réel problème, et c’est sans doute lié à une de mes habitudes que de survoler et de récupérer les informations dont j’ai besoin au moment où elles se révèlent nécessaires. Là ce ne sera pas possible.

Dés

Concernant le cœur des règles, c’est très simple. Lorsqu’un test est demandé, le joueur lance 1d12 et ajoute la valeur d’une caractéristique parmi quatre, et 1 réussite supplémentaire s’il dispose d’une compétence appropriée. Si on dépasse ou égale la difficulté, l’action est réussie, sinon elle échoue. Les jets à demander et les résultats en cas de réussite ou d’échec sont systématiquement indiqués dans les scénarios, permettant au maître de jeu débutant d’être guidé et de mieux comprendre cette partie de la maîtrise.

Combat

Les combats sont triviaux et durent généralement deux ou trois tours de jeu au maximum. Les personnages ont deux points de vie, ce qui leur permet d’encaisser un ou deux coups avant de s’effondrer. Il n’y a pas de règle sur la mort, les personnages échouant à un combat étant systématiquement sauvés, mais devant jouer le scenario suivant avec divers malus.

Les personnages

Les quatre personnages proposés sont extrêmement génériques et, à mon humble avis, n’ont pas trop de personnalité. Ce qui est sans doute fait exprès et permet à des débutants de ne pas avoir à s’inquiéter de jouer différemment d’eux-mêmes. Un peu comme les personnages de jeu vidéo qui ne parlent pas et permettent ainsi au joueur de s’immerger et de “s’y croire”.

Pour la joueuse, créer un personnage est simplissime, elle choisit une feuille parmi les quatre, la pose du côté qu’elle le souhaite, homme ou femme et c’est tout pour la première partie. C’est à la seconde partie qu’il faudra choisir un historique parmi deux, ce dernier ajoutant quelques compétences, et ajouter un équipement spécifique unique pré-déterminé.

Les scénarios et l’histoire globale

Il y a 9 scénarios, si on inclue l’introduction, chacun étant prévu pour durer 30 minutes. Ils sont tous décrits de la même façon par un petit paragraphe de synopsis donnant les enjeux du scénario puis trois scènes et enfin un épilogue. Chacun d’entre eux précise exactement les équipements à utiliser, les indices à trouver, les illustrations à montrer, et pour chaque scène ce qu’il y a à dire et les jets de dés à demander. C’est très linéaire, et probablement très adapté à des maîtres de jeu débutants.

L’histoire n’est pas très complexe et pioche allègrement dans les théories du complot et la technologie futuriste.

Le début est principalement constitué de combat, mais après cela varie avec de l’enquête (avec une petite astuce graphique rigolote à un moment, mais chut), du social, de l’exploration puis un gros combat final parce que hein bon. Bref du classique éprouvé mille fois. Cela dit l’ambiance me fait penser à l’ancienne campagne du Réseau Divin parue dans Casus belli de la première époque et qui était déjà proposé dans un format par épisode très court dans le même genre. Je suis sûr que le jeu est parfaitement adaptable à cette campagne.

Pour moi, la fin est trop précipitée et les deux derniers scénarios aurait mérité d’être chacun découpé en deux ou trois pour éviter l’effet tunnel de certains jeux vidéos ou après un certain point, on est embarqué jusqu’à la fin sans possibilité d’en sortir. Et le combat final est posé comme un cheveu dans la soupe. J’aurais voulu que son approche soit un peu différente. Ça m’a un peu fait l’effet des combats de boss de Deus Ex Mankind pour ceux qui ont la ref. Pour les autres, dans un jeu qui fait la part belle au choix dans les approches, lorsqu’un boss arrive, c’est bourrinage sans réflexion, ce qui contraste fortement avec la proposition initiale. Ben là, j’ai trouvé que c’était un peu pareil.

Conclusion

Je trouve que le concept est parfaitement respecté. Les premiers épisodes guident bien le maître de jeu débutant, et les joueuses n’ont de leur côté quasiment rien à faire qu’à se laisser porter. Le système est très simple, mais encore un poil compliqué, surtout dans son écriture. J’aurais bien aimé apprendre les règles en jouant le premier scénario (mais je suis biaisé, c’est ce que j’ai fait pour le scénario d’initiation d’YxY).

Le format est clair, concis, les illustrations sont jolies et immersives. Ne manque que quelques conseils d’ambiances musicales au début de chaque épisode et cela aurait été parfait.

Comme dans une série TV, si l’histoire est simple, le développement final laisse entrevoir une suite intéressante que j’ai hâte de découvrir.

Enfin, le prix de 32 € me parait adapté pour un matériel de qualité et trois ou quatre séances de jeu si on enchaîne les épisodes.

Café-rôliste S02E02 avec Josselin Grange

Un second épisode de cette nouvelle saison de café-rôliste aujourd’hui avec un entretien, en mode chill, de Josselin Grange. Illustrateur de talent pour de nombreux jeu de rôle, chef d’entreprise et évidemment rôliste, il nous parle de son métier, de sa passion, de sa manière de jouer, mais aussi d’argent.

Cet épisode est particulier. Nous l’avons enregistré à distance, via Discord, et j’ai donc monté une chaîne Youtube spécifique pour y diffuser, pour la première, la version vidéo.

À part voir nos têtes (et c’est déjà super), la version vidéo n’apporte pas beaucoup plus que l’audio, que je mets à disposition ici même pour ceux qui ne veulent dépenser de la bande passante pour rien.

Par contre, si vous allez sur Youtube, *langage de djeun influenceur* ben vous lâchez un com, vous vous abonnez et vous cliquez sur la cloche !

Liens

Le site de Josselin

Retour sur l’Elderfest :

Le twitch de l’Elferest

Ludovox https://ludovox.fr/retour-sur-lelderf…

Jouer en ligne :

Foundry Virtual Table Top (VTT) https://foundryvtt.com/

Roll20 https://roll20.net/

Cours d’illustration :

https://digitalpainting.school/

Café-rôliste nouvelle saison, S02E01, avec Louis Brach de chez Bragelonne

C’est un jour particulier aujourd’hui. En effet, après une pause de quelque temps, je reprends enfin les café-rôliste. À l’occasion de l’elderfest, j’ai rencontré des tas de gens formidables et très actifs dans le milieu, chacun à leur façon.

Je relance donc une série de Café-rôlistes officiels sous la forme d’interview de gens de plein d’horizons.

Aujourd’hui, je suis avec Louis Brach travaillant chez Bragelonne et rédacteur en chef du site Syfantasy.

Un épisode un peu long, plus d’une heure, mais une discussion passionnante sur le milieu de l’édition vu de l’intérieur. J’espère que vous l’apprécierez !

Liens :

Syfantasy

Aria

Cat’s la mascarade

Rocambole (devenu l’application Doors)

La déconnexion de Ploum

Le carnet en peau de dragon

Retour sur l’Elderfest

Il y a quelques jours se tenait l’Elderfest, une sorte de miniconvention organisée par la société Eldercraft et son patron Sébastien Moricard.

J’ai eu la chance d’y être invité, et même placé sur le devant de la scène pendant un moment puisque l’ensemble des annonces ont été diffusées en temps réel sur Twitch, sur la chaîne de Fibretigre, et j’ai pu m’y présenter, et présenter Ludovox. Merci à Sébastien pour ce moment dans la lumière.

On y a parlé principalement d’Aria, le monde de FibreTigre dont le jeu de rôle éponyme est le produit principal de l’éditeur, mais aussi d’Oreste, et d’autres annonces, dont certaines assez surprenantes (dans le sens heureux du terme).

Enfin, j’ai aussi pu remettre un pied et demi dans le monde du jdr, enchainant en seconde partie, beaucoup de rencontres avec des personnalités de divers horizons, jeu de rôle, podcast ou encore littérature fantastique.

Aria

FibreTigre est le créateur de cet univers de fantasy, où, contrairement à la plupart des jeux du genre, les personnages doivent résoudre les problèmes pacifiquement. Le jeu est prévu pour être joué facilement et mettre en place des aventures au niveau plus humain, loin des combats de dragons que les donjonistes connaissent bien.

Ce monde se développe aussi grâce aux équipes de Game of rôle, une bande d’aventuriers dont les histoires sont diffusées sur Twitch depuis 2018. Le succès est immense et des milliers de spectateurs viennent régulièrement regarder l’émission qui en est à sa cinquième saison. Un spin-off a même été réalisé par le site Madmoizelle.

Eldercraft produit ses jeux en utilisant systématiquement le financement participatif, pour des raisons marketing, de production, et gestion qu’il serait difficile de tenir autrement et Aria, en 2020 est le second plus gros succès français sur Ulule.

Sébastien en parle avec moi là :

Elder Fest : présentation des sorties Elder Craft / Aria / Game of rôles ! – fibretigre on Twitch

Il est amusant de constater que des gens comme Clément Viktorovitch vient de lancer une campagne sur sa propre chaine, et que le célèbre M. Le prof est un des auteurs important du jeu.

Et à part ça ?

Eldercraft produit d’autres univers comme celui d’Oreste, décrit par l’éditeur comme une sorte de Warcraft dans l’espace, du space-op avec des tas de races, mais la particularité de n’autoriser, toutefois au début du jeu, que des personnages humains. Il s’agit d’un jeu à secret, et la proposition est que les joueurs et les personnages débarquent dans l’univers avec le même niveau minimal de connaissance.

Il y a aussi deux autres produits, dit RPG-book, l’un ayant pour thème Cthulhu, et l’autre l’espace infini appelé Exil. Ces livres sont des hybrides de livres dont vous êtes le héros pouvant être joué seuls, ou à plusieurs (jusqu’à 4) mais ils sont aussi adaptables en jeu de rôle ! Trois en un !

Pour avoir testé celui sur Cthulhu, je dois avouer avoir été agréablement surpris par le système de jeu simple, et surtout, surtout, l’écriture qui m’a très rapidement embarqué dans l’aventure. J’ai hâte de faire le second !

Pour l’ensemble des produits, je dois dire être impressionné par la qualité qui s’en dégage. Aussi bien des illustrations réellement inspirantes, que des textes ou même les objets en eux-mêmes, particulièrement réussis.

Bon, super, mais les annonces alors ?

J’y viens !

Lors de l’Elderfest, plusieurs annonces ont été faites. Aussi bien dans les games Game of rôle , qu’Oreste mais l’annonce la plus importante, à mon sens, est le retour des Lames du cardinal.

Dans ce jeu, inspiré de la série de romans de Pierre Pevel, le cardinal de Richelieu monte une équipe de mousquetaires entraînés, des sortes d’agent secret, dont le but est de combattre la menace Dragon. En effet, ces derniers existent et se mêlent à la population, cherchant à prendre le prendre dans les différentes cours royales d’Europe.

La première édition du jeu a été édité en 2014 par Sans-détour, qui n’existe plus aujourd’hui mais son auteur principal, Philippe Auribeau, a proposé à Eldercraft de l’éditer et ils ont accepté. Un financement participatif devrait apparaitre d’ici à quelques semaines ou quelques mois mais, et c’est important, la quasi-totalité des textes sont déjà prêts ! Les illustrations seront réalisées par Loic Muzy, une patte graphique exceptionnelle, déjà à l’œuvre depuis longtemps sur la gamme Cthulhu de Sans-détour.

On espère simplement que cette fois, le système de jeu deviendra meilleur, le premier n’étant, à mon avis, pas suffisamment abouti.

Enfin, notons qu’un jeu vidéo dans l’univers d’Aria est en préparation, mais je n’en sais pas plus sur le type de jeu ou ce qu’on devra y faire.

En vrac

  • De nouveaux illustrateurs ont été recrutés, Morwen Cloastre, Valentin Borowczyk et Paul Ferret. Ils travailleront sur les projets Hydre, 1979, Immersion et un autre projet, non encore annoncé.
  • Un magasin de goodies ouvrira bientôt : L’elder gear store.
  • Un bd dont vous êtes le héros chez Malaka Edition, dessinée par Waltch et scénarisée par M.Le prof (qui va sans doute arrêter d’enseigner à ce train-là)
  • Des outils spécialisés, comme une scénariothèque centré sur Oreste et Aria : http://oreste.onirim.fr ou un VTT (virtual table top) https://praythedice.com
  • Un roman dans l’univers d’Aria.
  • Un jeu de carte dans l’univers d’Aria.
  • Hydre, un jeu de rôle de chasseurs de monstres.
  • 1979, un jeu de rôle d’agent secret.
  • Immersion, mi-jeu de rôle, mi-jeu de société, et re-mi jeu de rôle derrière. On n’en sait pas plus, mais je vais suivre de près les annonces, étant particulièrement intéressé en ce moment par les jeux de société proposant des expériences jeu de rôle.

Conclusion

À titre personnel, le succès d’Aria me fait grandement plaisir et sa visibilité énorme sort du cadre des simples rôlistes pour toucher une partie sensible du grand-public. Les rôlistes sont aujourd’hui aux manettes d’une partie très importante de l’industrie du divertissement, qu’il s’agit du jeu vidéo évidemment dont on s’est emparé très tôt, mais aussi du cinéma avec de nombreux acteurs avouant leur passion rôliste, problématique il y a 20 ans, mais extrêmement mise en avant aujourd’hui, sans parler des séries TV comme Big Bang Theory ou évidemment Stranger Things qui le montre très directement.

Chaque année, ‘on’ annonce la mort de jeu du rôle. Le jeu de rôle ne meurt pas, il se transforme et sa vitalité est plus grande que jamais.

Merci encore à Sébastien et Eldercraft et je leur souhaite un grand succès pour leurs prochaines campagnes !

Cet article a d’abord été proposé sur Ludovox.

Yuri x Yurei – Kit d’initiation

Le blog n’est pas mort, et YxY non plus bien sûr. Aujourd’hui un petit article en forme de récap des derniers évènements et un presque nouveau document.


Le Kit d’initiation de YxY est un document qui rassemble la dernière version des règles de YxY apéro, légèrement augmentée et améliorée par plusieurs mois de play-tests, ainsi que le scénario déjà paru ici même : La chair et le feu.

Il ne s’agissait pas seulement de fusionner des pdfs, mais bien de réécrire ce qui devait l’être, d’insérer des corrections, et surtout de refaire entièrement la maquette pour qu’elle colle un peu plus avec ce qui sera la version finale d’YxY. Il y a aussi quelques illus en plus, comme ça pour le fun. Je suis toujours aussi mauvais graphiste, et cette couverture est clairement pas dingue mais je tente des trucs et j’apprends, c’est bien le principal.

Le travail pour le rendre dispo en print-on-demand (je passe par le bien connu Lulu) a été effectué, et j’attends impatiemment mon exemplaire pour voir si tout est imprimé correctement, ce dont je doute vue la difficulté à s’inscrire dans le modèle de fichier de l’éditeur. Cela dit maintenant je pense avoir compris comment ça fonctionne, comment on produit les fichiers, et j’espère que le résultat sera à la hauteur. J’ai hâte !

Toujours concernant l’impression, je mets le pdf gratuitement évidemment ci-dessous, mais sachez qu’il n’est clairement pas printer-friendly. Il y a des aplats de noirs, des illus en couleurs, bref, vous faisez bien comme voulvoul mais j’aurais prévenu.

Le fichier se trouve ici : Kit d’initiation YxY

Un système d’expérience organique

La plupart des jeux de rôle proposent un système d’expérience pour faire progresser les personnages. Par le temps, les aventures et les rencontres ils deviennent plus forts sur la voie qu’ils ont choisie. Souvent, cette progression est linéaire, et abstraite. Le personnage accumule les points d’expérience jusqu’à passer un palier qui lui permet de s’améliorer, et ainsi de suite. Certains systèmes permettent d’augmenter les compétences utilisées souvent ou autorise une répartition de points après un certain temps.

Dans l’article qui suit je propose une règle complémentaire, ou remplaçant les abstractions précédentes.


L’expérience organique est celle obtenue par un personnage lors d’une action quelconque, significative et mémorable.

Significative parce qu’elle peut avoir un impact important sur l’histoire. Mémorable parce que le contexte dans lequel la situation a eu lieu a pu marquer l’esprit du personnage ou de ses compagnons. Dans certains cas, que je vais préciser, le joueur est autorisé à inscrire cette expérience sur sa feuille de personnage, ce qui pourra l’aider dans le futur.

Comme c’est un peu nébuleux, voici tout d’abord la règle que j’utilise dans certaines versions d’YxY.

Chaque fois qu’un personnage tente une action importante et significative (en gros, quand il lance les dés pour une action non triviale), si le résultat obtenu est un double-6 ou un double-1, il peut, s’il le souhaite, inscrire la situation, c’est à dire l’action et le contexte, sur sa feuille de personnage. Cette situation doit faire quelques mots, au maximum une phrase, et doit indiquer ce qu’il a fait et dans quelle circonstance.

Par exemple, imaginons que Velcro le célèbre gobelin cambrioleur tente de fuir la maréchaussée en grimpant à toute vitesse sur les toits grâce à une gouttière opportunément placée dans le cul-de-sac dans lequel il vient malheureusement de s’engouffrer. Prenant appui sur une poubelle, il se projette vers la gouttière et tente de s’y hisser prestement. Il lance les dés et obtient un double-1. Malgré son talent pour la fuite, c’est un échec retentissant (qu’on pourrait qualifier de critique dans les autres jeux). La meneuse décrit comment la gouttière craque puis s’effondre sous son poids tandis que les gentilles forces de l’ordre dégainent leur matraque en souriant à pleine dents à l’idée de ce qu’ils vont faire subir au malheureux gobelin tout penaud au fond de sa poubelle.

C’est dans sa cellule, en comptant que les os qui lui restent en bon état, qu’il se dit qu’il aurait pu s’y prendre autrement, placer son pied différemment et sans doute ne pas s’appuyer sur la première gouttière pleine de rouille qu’il a vu.

La meneuse de jeu l’autorise à inscrire sur sa feuille : « Grimper une façade à toute vitesse ».

La prochaine fois qu’une situation similaire se présentera, il aura droit à un bonus. Dans ma version, c’est une relance de dés, mais peu importe.

Il y a tout de même un souci, quoi inscrire ?

Et bien tout dépend de l’univers, et des envies des joueurs et meneuse de jeu. Si la description est trop réduite, cette expérience ne servira jamais et, à l’inverse, un simple « Grimper » servira probablement tellement souvent que cela deviendra un talent à part entière, très large mais qui ne rappellera que peu son origine.

Mon conseil est évidemment de faire entre les deux, quelque chose qui sera fondamentalement utile (il est probable que Velcro tentera souvent de s’enfuir en grimpant une façade), tout en n’étant pas trop générique.

Généralement, je limite aussi le nombre d’expériences organiques, soit avec un chiffre fixe, par exemple 5, soit par niveau, ou un calcul savant permettant de commencer petit et d’avoir de plus en plus d’expérience à mesure que le personnage évolue.

Si un personnage devait inscrire une expérience alors qu’il ne pouvait pas le faire, il supprimera simplement une expérience précédente.

Mes systèmes sont souvent basés sur la négociation, qu’il s’agisse de définir une spécialité à la création de personnage ou de demander l’utilisation d’un domaine à la place d’un autre par la grâce d’une chouette description, j’aime l’idée de pouvoir agir sur les règles, et donc sur le monde, avec une bonne idée.

Je comprends que cela ne plaise pas à tout le monde, et clairement cela demande une certaine souplesse de maîtrise et un peu de compréhension des joueurs mais le résultat est qu’un personnage qui a joué, qui a vécu dispose d’une panoplie très colorée d’expériences organiques et n’est pas simplement un tas de chiffre.

Si on veut aller plus loin, il est possible d’utiliser cette règle pour créer des compétences et des talents spéciaux obtenus uniquement dans certaines circonstances. Tout ce qui n’est pas définit spécifiquement par les règles peut être ajouté sous forme d’une connaissance particulière. Parfois, d’autres jeux laissent des lignes pour ajouter des compétences non prévues. Le système d’expérience organique peut être utilisé pour cela.

Tant que cela ajoute de la chair au personnage, c’est bon à prendre.

Considération de game-design autour des avantages et du système de réserve dans YxY

Encore un article de game-design autour du système d’YxY, parce que pourquoi pas. Aujourd’hui je parle du système d’avantage et de la manière dont on peut s’en servir pour promouvoir du roleplay pendant la partie via le système de talisman et de trophée.


Des avantages et des réserves

Le système d’YxY tourne autour de deux idées majeures, un jet de dé tactique (simple mais offrant le choix d’une prise de risque), et les avantages, des points de bonus pour réussir ou action ou activer des effets spéciaux. Dans une situation autre que le combat, dépenser des avantages en plus de la réussite d’une action est la seule manière de quantifier cette réussite, plus on dépense d’avantage, mieux l’action est réussie.

Dans la plupart des situations normales, les joueuses auront peu besoin d’avantages. Les difficultés étant atteignables grâce à leur compétence et leur équipement. Mais plus la menace grandit plus les difficultés (des jets de dés) augmente, jusqu’à arriver à un niveau absolument impossible à réussir normalement. C’est là que les avantages entrent en jeu.

Pour rappel, les avantages sont des points, matérialisés par des jetons, que les joueuses peuvent dépenser quand bon leur semble pour réussir une action autrement impossible.

L’intérêt de ce système d’avantage c’est qu’on peut les adapter à l’univers, en faire un enjeu à part entière. On peut jouer sur la manière de les gagner, de les RE-gagner, de les posséder dès le départ etc.

Par exemple, dans la version YxY apéro, on gagne les avantages de trois façons

  • Chaque fois qu’un dé donne un 6, on gagne un avantage à dépenser quand on veut.
  • Lorsqu’on s’entraide ou qu’on se prépare, on gagne des avantages à dépenser pour l’action visée.
  • On peut sacrifier quelque chose pour obtenir des avantages pour une action donnée.

Dans Big Ben Tentacule, il existe un système de réserve, appelée Flegme. Cette réserve donne un nombre d’avantage spécifique qu’il est possible de dépenser pour des usages liés à l’univers Lovecraftien qu’il cherche à émuler. L’idée est de promouvoir, par le système, une manière de jouer spécifique. Par cette astuce, j’attends des joueurs qu’ils jouent des britanniques combattant un mal cosmique une tasse de thé à la main, le petit doigt en l’air ;

Je travaille sur une version Donjonnesque du système (non paru) dans lequel la joueuse pourra augmenter son personnage en choisissant des capacités d’Aventurier, de Mage et de Guerrier. Chaque fois qu’une capacité est prise dans un de ces trois domaines, une réserve liée (donc une réserve d’aventure, de magie et de combat) augmente d’un point. Si vous connaissez Donjons et Dragons, vous pouvez y voir une sorte de multiclassage, comme si ces réserves étaient les niveaux du personnage dans ces trois méta-domaines.

Chaque réserve permet des usages spécifiques et se récupère différemment créant encore une fois, une manière de jouer et des scènes spécifiques.

Talisman et trophées

Dans Yuri cross Yurei, la version complète en cours d’écriture, j’utilise un système de talismans et de trophées.

Un talisman est un objet réceptacle d’une émotion ou susceptible de générer une émotion positive. Il peut s’agir de n’importe quoi tant qu’on peut y accrocher de l’histoire. Dans énormément d’œuvres de fiction le héros possède ce genre d’objet. Il peut s’agir d’une voiture qui sert de base mobile, du médaillon d’un parent défunt, d’une arme transmise de génération en génération, du bracelet brésilien donné par un enfant, d’une mèche de cheveu d’un ancien amant, une compilation de musiques des années 80 ou un cadeau particulièrement personnalisé, bref tout ce qui permet à un personnage de ressentir quelque chose et qui ne soit pas un simple outil.

Un trophée est un talisman spécifique car créé par un personnage après une épreuve importante. Là où le talisman provient de quelqu’un d’autre (mais l’émotion provient du personnage lui-même), le trophée est une manière pour le personnage d’y investir une part de lui-même, de se créer le support d’une émotion, un rappel de ses exploits passés.

En termes de règles, un talisman contient des avantages, c’est une réserve externe au lieu d’être interne.

Un talisman est créé après une scène sociale forte, intime, dans laquelle les personnages ont changé leur relation. Dans la culture nipponne, le cadeau est une valeur importante, appréciée. Ce système permet de récompenser, mécaniquement, les idées des joueuses allant dans ce sens.

Les trophées permettent aux joueuses qui ont particulièrement bien réussi un combat d’investir les avantages qu’elles possèdent, et qu’elles risquent de perdre ou de dépenser, dans un objet. Elles vont thésauriser des points volatiles dans un objet physiques. On peut aussi voir dans l’accumulation des trophées un système d’expérience alternatif leur permettant de combattre des ennemis de plus en plus puissants et difficile à vaincre, apportant par leur défaite des trophées de plus en plus puissants.

Plus de précisions dans le jeu complet, qui avance bien d’ailleurs grâce au retour d’un des auteurs d’origine, Matthieu Destephe, qui travaille sur la mise en page et les illustrations. Merci à lui.

« System matters »

De la notion de prise de risque dans la technique rôlistique

Ce matin j’ai participé à une petite expérience rôlistique via le live Facebook grâce à l’ami Sandy Julien qui nous a narré de sa voix calme et grave une petite partie d’Alien, le jeu de rôle qu’il traduit actuellement. Pendant la partie, il a utilisé une règle appelée dé de stress qui mesure le degré de stress donc du personnage incarné. Ce dé est ajouté à tout test, pouvant améliorer son résultat ou même transformer un échec en réussite mais en cas de 1 sur le dé, il se passe quelque chose de grave.  C’est sous une forme similaire que j’écris quasi systématiquement mes règles de prise de risque.


J’ai plusieurs marottes en game design, plusieurs concepts que j’efforce d’intégrer et d’affiner au fil des systèmes que j’écris. La prise de risque est une de ces marottes. Elle représente la possibilité technique qu’à un joueur de décider, à chaque jet de dé (atomisation de la décision) si son personnage prend un risque. C’est évidemment une exploitation directe du concept de risque/récompense qu’on retrouve dans tous les manuels de game design.

Comme beaucoup de mes systèmes, je veux que ce soit utilisé, au besoin et à l’envi du joueur. Prenons trois exemples.

Dans Face8, le système utilisé par Artefya, et dont les prémisses se trouvaient déjà dans Continuum, on lance une poignée de dés dont chaque résultat est comparé à la difficulté. Un dé égalant ou dépassant la difficulté est une réussite, plus il y a de réussite, mieux c’est. Le système est écrit de telle manière qu’il est facile de réussir normalement mais difficile de le faire avec éclat.

Dans ce cas, le joueur est invité à ajouter des dés de risque à sa poignée avant de les lancer. Ces dés peuvent réussir mais en cas de 1 (comme dans Alien du coup), il se produit un évènement grave pour le personnage. Il peut donc tout à fait réussir son action MAIS avec un problème supplémentaire. On retombe d’ailleurs dans les systèmes narratifs type « Oui, et », « Non, mais » etc.

Dans Maxximum Badass, les personnages sont des héros de films d’action qui en prennent plein la gueule. C’est haut en couleur et le principe est de tout réussir très fort, et d’en encaisser encore plus. On est typiquement dans le film américain où les combattants arrêtent les coups avec leur tête. Il s’agit ici d’infliger un maximum de désagrément aux héros, le côté amusant se trouvant dans le fait qu’ils puissent l’encaisser. Le Jeu Hellywood est un bon exemple de jeu où on trouve ce genre de personnage (ça me fait penser que je parlerai un jour de la différence fondamentale entre la description narrative et l’effet technique).

Le système est un peu particulier, chaque scène dispose d’une valeur, d’un nombre de point qu’il s’agit de battre en cumulant les jets de dés. Si la scène n’est pas vaincue en un seul tour, les personnages encaissent des « punitions », désagréments plus ou moins violents. Les difficultés étant élevées, les joueurs sont invités à ajouter des dés de risque qui s’ajoutent au résultat total. La différence par rapport a Face8 étant que la prise de risque est aussi importante, et même plus, que la compétence du personnage.

Un personnage très fort dans un domaine dispose de trois d6 à lancer (et en fait la somme), un personnage nul ne lance aucun dé. N’importe quel personnage peut lancer jusqu’à trois dés de risque supplémentaires et les ajouter au total, oui même, et surtout, les personnages mauvais. Si au moins un dé fait un 1, le personnage encaisse aussi des désagréments (blessures, perte d’objets ou de pns etc). Plus on lance de dés, plus la chance d’obtenir un 1 augmente, ce qui est mauvais pour le total et crée des problèmes. C’est un choix cornélien à chaque fois.

Dans YxY, il y a déjà un système de sacrifice qui gère en partie cette notion de risque, mais à postériori. Par contre, le cœur du système est articulé autour du choix tactique.

Un personnage va normalement lancer 2d6 plus une caractéristique/compétence entre 0 et 3. Il peut tout à fait choisir de transformer un point de sa caractéristique en d6 supplémentaires, mais n’en garde que deux (l’idée est tirée de l’excellent jeu Michtim). Par exemple, un personnage qui devrait lancer 2d6+2, peut lancer 3d6+1 ou 4d6. Sachant que les 6 donnent un avantage de jeu supplémentaire, le joueur est constamment tiraillé entre la volonté de lisser le résultat statistique probable et tenter d’obtenir un résultat élevé. Choix d’autant plus compliqué si la difficulté est haute, obligeant à la prise de risque.

Par ces différents exemples, extensibles à l’infini, on voit que le système de jeu donne des possibilités différents aux joueurs et la sensation de constamment décider du risque à prendre, permettant de transférer, encore une fois, le meneur d’une partie de cette décision.